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Researching the Fortress of Louisbourg National Historic Site of Canada
  Recherche sur la Forteresse-de-Louisbourg Lieu historique national du Canada

ETUDE SUR LES PROPRIÉTÉ DE LOUISBOURG
RAPPORT NO. II - LES RUES

BY

RODRIGUE LAVOIE

(Sous la direction de B. C. Bickerton)

October 6, 1965

Report H D 3

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For these, please consult the original report in the archives of the Fortress of Louisbourg

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Chapitre V

LA LEGISLATION URBAINE ET SON APPLICATION

Au terme de cette analyse du plan de la ville de Louisbourg, de cette étude du tracé de ses rues et de son évolution, plusieurs points restent en suspens: l'entretien des rues, leur usage, le le des particuliers et du gouvernement, bref, le fonctionnement de l'organisme urbain à Louisbourg. Ceci peut sembler plus ou moins utile a notre propos, mais nous pouvons y trouver d'intéressantes indications touchant notre domaine précis: comment, par exemple, les rues étaient-elles bornées par les terrains? comment les traçait-on? qu'y trouvait-on? comment le plan-t-il pu être réalisé?

Comme la plupart des problèmes quotidiens de la vie à l'époque, ces questions se résolvaient par des ordonnances, un ensemble de textes législatifs qui venaient statuer et préciser les rôles de chacun. Une législation urbaine, inspirée évidemment de ce qui se faisait ailleurs, a donc pris corps à Louisbourg, plus précise que partout ailleurs peutêtre, en comparaison de Québec et de Montréal notamment.

En effet la législation urbaine de Louisbourg est d'autant plus intéressante et importante que le territoire de la cité, contrairement à Québec et à Montréal, notamment ne fut jamais concede à un seigneur, mais releva toujours directement du gouvernement, du roi. Ceci explique l'uniformité de Louisbourg, et le fait que l'on ait pu y établir un plan général et veiller à son exécution, préoccupations qui ne venaient que trés rarement a l'esprit des petits seigneurs particuliers avides de leur propre intérêt.


Propriété du Roi, le terrain est concédé, gratuitement, aux gens qui en font la demande. Mais ce n'est pas sans conditions, et la plus grande partie de l'appareil législatif qui accompagne la concession d'un terrain est conditionée par la préoccupation de promouvoir d'abord le bien public. Les concessionnaires sont avant tout des gens responsables du bien être général de la ville, chacun dans leur petite section particulière.

Dés 1720, nous trouvons une législation très précise concernant la concession de terrains à Louisbourg [1]. Elle ne sera plus guère que répétée dans ses grandes lignes par la suite. Comme nous l'avons dit précédemment, elle est surtout exée sur le bien public, et vise à faire exécuter sur le terrain le plan de la ville (à remarquer que, sur papier, ce sont les rues qui délimitent les îlots et les terrain, tandis que sur le sol me, les rues se marquent par les constructions qui les bordent, ce qui indique que la rue suivra l'alignement que l'on donnera aux maisons). De plus, a une époque où les services publics sont encore peu développée, il faut préciser les devoirs de chacun à l'egard  du bien public, celui-ci relevant de l'effort de chacun en bonne partie.

Voici le détail de cette législation urbaine de 1720 et les précisions qui furent apportées par la suite, à mesure que le besoin s'en faisait sentir:

"le.
Bastir les maisons et magasins sur les faces des rues".

Ce sont ces constructions qui vont délimiter les rues. Pour l'exécution du plan, il est nécessaire de veiller à leur situation. Il faut donc que les maisons soient sises en conformité du plan, et de façon à constituer l'alignement de la rue. Aussi, des 1722, le roi précise-t-il et

"deffend de laisser sur le bord de la rue du Quay, de la rue Royalle, de la rue d'Orléans et des rues qui les traversent des Terrains en jardinage ou sans estre bâtis, quand meme ils seroient entourée de Murailles ou de Pieux, Le Tout a peine de reunion" [2]

"2e.
M
ettre à l'uny La Moitié des rues qui font face aux concessions".

L'entretien des rues relève donc des concessionnaires. On comprend dès lors que l'on tint mordicus à ce que les terrains concédés fussent occupés, et que l'on cherchât à concéder le plus de terrains possible, un terrain non construit ou non concédé empêchant de "faire observer la police du netoyement des rues ce qui nuit à la proprietté de la Ville et à la Commodité publicque" [3]. En 1737, quelques plaintes sont portées à ce propos [4]. Ce dernier texte laisse croire qu'il existait effectivement une "police du netoyement des rues", c'est-à-dire que l'on veillait a ce que "chacun accompit ses devoirs. De fait, réussisait-on à garder la ville propre? En 1728, le gouverneur est obligé d'émettre une ordonnance pour empêcher que les gens ne laissent circuler leurs"cochons" dans la ville [5]. En 1752, il fallut ordonner

"a tout proprietaires et Locataires d'Environ de la ville de casser les glaces qui restent au devant de leur maisons et terrain en dependants et des les deposer Au milieu de la rue affin qu'elle puissent se fondre plus promptement et de rendre les rues plus praticable et [...] aussi [...] de balayer et netoyer ensuitte le devant de leurs maisons et terrains" [6] .

"3e.
Faire un  petit canal au milieu des rues a moitié faits
de pierre seiche pour l'ecoullement des eaux".

Nous touchons ici le problème suivants comment étaient faites les rues? Nous y reviendrons plus loin. Pour l'instante il appert que les concessionnaires sont responsables de l'égouttement de leurs terrains et de la rue. Au centre de celle-ci, ils doivent construire un canal qui achemine les eaux depuis leurs terrains (prenant à bail une maison, un locataire s'engage a "faire un canal qui conduise de la cave de la maison à la mer les immondices" [7] et qui les achemine à la mer. Pour cela, les rues qui tombent sur le quai sont creusées afin qu'elles aient la pente cessaire pour laisser écouler les eaux de la ville. [8]

"4e.
Ne point donner l'écoullement des toits sur les voisins, mais
sur le de devant et mur derrière des maisons et
magasins

"5e.
Les maison et magasins qui sont point bastis en mur et [sic pro: mais]
en bois seulement, doivent laisser un espace entre celle [entre elles]
et les voisins de trois pieds au moins pour les  accidents du feu
et les écoulements des eaux."

"6e.
Les separations des cours et jardins pourront être avec des piquets à la volonté
des proprietaires (Au fait, toutes les propriétés semblent avoir été ainsi
c
lôturées, et l'on en retrouve plusieurs assertions dans les textes.) [9]

Ces trois deniers articles visent à assurer le bon ordre entre voisins. Pour notre propos, ils manifestent clairement que les égouts des maisons et des terrains sont conduite dam les rues.

"7e.
On ne mettra point des piquets d'avance pour
soutient dans les rues mais seulement des lisses
d'apuy et de liation du haut en bas".

On couvait être tenté de gruger un peu sur le terrain réservé pour la rue en se construisant. Bien entendu, il est défendu de se construire dans les rues de même que sur le quai et sur les places publiques [10]. Néanmoins, la délimitation de ces divers emplacements arrivant souvent trop tard, il était difficile d'en délonger ceux qui s'y étaient installés. A preuve, la farouche obstination des gens à ne point changer l'alignement de la rue du Quay. De même, de nombreuses plaintes sont portées contre l'ingénieur qui ordonne la démolition de bâtiments situés en dehors des alignements.

"8e.
On sera obligé d'être bâty dans l'année de la concession".

Le premier but de cet article, c'est évidement d'assurer la construction complète de la ville. De plus, on ne peut faire observer autrement l'obligation de nettoyer les rues. En outre, on veut empêcher que les gens n'accumulent plusieurs concessions sans les faire valoir,, attendant un moment favorable pour les ventre (risque de spéculation). La chose est surtout dangereuse après 1734, alors que la plus grande partie des terrains de la ville sont concédés. En 1737, on répète encore cet avertissement:

"l'une des principales conditions, sous lesquelles Les terrains de cette colonie sont concédés aux habitants, est Celle qu'ils feront valoir Leurs Concessions, qu'ils les défricheront et y Battiront pour tenir feu et Lieu dans l'année qu'elles leur sont données [ ... ] Divers particuliers à qui depuis plusieurs années on a accordé des Concessions dans l'Enceinte de Cette Ville négligent de l'en faire valoir ce oui est prejudiciable a L'etablissement de la Colonie par plusieurs raisons entrautres: le. Par ce que Ces terrains Inhabitées deguisent Les alignements des Rues, privent Les voisins des secours que l'on Tire les uns des autres, et [nous l'avons souligné déjà] on ne peut faire observer la police du netoyement des Rues" [11].

En 1739, nous savons déjà que sept des dix terrains ex propriés pour l'enceinte du côté de la point de Rochefort n'étaient pas construits. Ici, la législation ne semble guère avoir été respectée a la lettre.


Ainsi, les concessionnaires s'obligeaient envers leurs voisins: écoulement des eaux du toit, mesures de protection contre les incendies, bornage et clôture de leurs terrains [12]. En Même temps, ils avaient des devoirs très stricts envers le bien public. conformité aux alignements, construction des édifices sur la bordure immédiate des rues, entretien de celles-ci, etc. La théorie était belle. Quant a la pratique, il est permis de croire que l'on obtenait malgré tout un certain minimum, et la rareté relative des ordonnances sur ce sujet, si l'on compare avec la répétition quasi annuelle des ordonnances concernant les cabarets, peut laisser supooser que les objectifs de la législation étaient au moins partiellement atteints.

Bien sûr, l'efficacité d'un tel service ne saurait se comparer à la façon dont le gouvernement remplissait les obligations qui lui incombaient. C'eût été une situation idéale. En effet, le long des bâtiments du gouvernement, l'entretien des rues incombait au roi. Dans un devis de marché passé avec le sieur Ganet, en 1727, l'on donne certaines indications, très précieuses à la vérité, sur la façon de construire les rues:

"Le Pavé de rues et dans les Bâtiments sera fait de Moêlon ordinaire posé par Routes [?] Egalles autant que faire se pourra sur forme de terre la plus granuleuse que l'on cherchera aux environs des Ouvrages, Battu a la Demoiselle et rejointe de cette même terre pour remplir les vuides, L'Entrepreneur se conformera aux Bombages et pentes necessaires qui luy seront donnés par L'Ingénieur" [13]

Par ailleurs, les rues le long de ces mêmes bâtiments, aux endroits nécessaires, étaient abaissées au dessous du niveau des terrains, afin d'empêcher que l'eau n'entrât dans les bâtiments. Il en était ainsi, du moins, pour la rue du Petit Etang, le long du hangard de l'Artillerie: la rue avait été baissée de 18 pouces au dessous du rez-de-chaussée du bâtiment, et l'on assurait le ministre, en 1738, que les eaux n'y entraient nullement [14].

Ce cont là, évidemment, des dispositions un peu idéales, que de paver les rues, les arrondir, les graveler et en abaisser le niveau de façon à ce que les terrains environnants se trouvent suffisamment à l'abri de l'eau de pluie et de la fonte des neiges. Il reste malheureusement tout-à-fait impossible de mesurer jusqu'a quel point cet idéal, en dehors de ce qui incombait à la charge du roi, pouvait être atteint.


Une autre fonction essentielle des rues de la ville de Louisbourg est que l'on y trouve la plupart des puits où les gens pouvainet venir s'approvisionner en eau. C'est bien inutilement que nous avons cherché à les situer exactement: les ingénieurs ne jugaient sans doute pas nécessaire d'inscrire de tels détails dans leurs rapports à la Cour, et il n'en est guère fait de mentions dans toute la correspondance que nous avons fouillée.

Néanmoins, nous en trouvons quelques renseignements dans une description que fait Franquet, en 1753, des bâtiments du Roi à Louisbourg:

"Il y a dans la Place 15 puits soit publics Etablis dans les Rues, au particuliers Dans les bâtiments oui sont a la charge du Roy".

[Sur la partie gauche du document Franquet fait les commentaires suivants:]

L'Entretient des ces Puits est totallement a la charge du Roy, la plupart de ceux qui sont sçitués dans les rues paroissent y avoir eté Etablis au hazard sans Consideration a l'Incommodité qu'ils peuvent causer. On Seroit d'avis qu'a mesure qu'on sera obligé de les revettir a neuf de les placer Enfoncée de toute leur Epaisseur dans les Clotures, néanmoins de face en rue et nullement dans leur milieu comme ils sont a peu près aujourdhuy" . [15]

On peut imaginer failement les problèmes que devaient poser ces puits située aussi incommodément. Sans doute Franquet exagère-t-il un peu la situation: il rêvait d'une ville un peu idéale ... De fait, nous sommes à peu près certain que les améliorations proposées par l'ingénieur ne furent pas réalisées et que Louisbourg conserva ses puits dans ses rues.

Par ailleurs, il semble avoir existé quelques puits privés,, situés à l'intérieur des îlots en 1743, un nommé Pierre Boisseau loue sa maison, sise dans lîlot 21, le long de la rue de l'Hôpital, avec le billard, la cour et le jardin adjacent "jusqu'au puits" [16].

Ce sont là les seuls renseignement que nous connaissions sur ce sujet. Si minimes qu'ils soient, ils n'en permettent pas moins de constater que les puits ont été installés de façon à accomoder les gens et éviter les conflits: ils sont donc le plus souvent dans les rues, vraisemblablement à la jonction de deux rues, ce qui les mettait à portée d'un plus grand nombre d'usagers.


Le fonctionement de l'organisme urbain à Louisbourg est donc régi par un appareil législatif qui a une double portées en premier lieu, il vise à obtenir le plus de bien être possible par ses stipulations générales. Cette première partie de la législation vise à l'exécution du plan de la ville, et au maintien de la ville en bon état. Elle est constituée de devoirs et de charges qui incombent à ceux qui reçoivent des concessions dans la ville, devoirs qui constituent la contre-partie nécessaire de l'obtention d'un terrain dans la ville. D'autre part, il stipule sur les relations entre voisine et vise à limiter les conflits possibles: cette second partie nous intéresse moins ici, car elle se situe en dehors de notre domaine précis.

On ne saurait diminuer ou minimiser les effets et le rôle de cette législation urbaine: l'exécution du plan de la ville lui est tout entière redevable, et c'est grâce a son application, même partielle, que le tracé des rues de la ville a été à peu près intégralement respecté tout au long de l'histoire de la ville. 

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