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Researching the Fortress of Louisbourg National Historic Site of Canada
  Recherche sur la Forteresse-de-Louisbourg Lieu historique national du Canada

ETUDE SUR LES PROPRIÉTÉ DE LOUISBOURG
RAPPORT NO. II - LES RUES

BY

RODRIGUE LAVOIE

(Sous la direction de B. C. Bickerton)

October 6, 1965

Report H D 3

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For these, please consult the original report in the archives of the Fortress of Louisbourg

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Table des Matières

Chapitre II

LE PLAN DE LA VILLE

Dès les toutes premières années de l'établissement de la ville, on avait senti la nécessité de légiférer au sujet de son aménagement: il fallait réserver des terrains pour les édifices publics avant que les "particuliers" n'eussent pris toutes les bonnes places: le régime de concession des terrains exigeait la fabrication d'un cadastre, et il fallait prévenire par la constitution d'un plan, les contestations possibles entre propriétaires; enfin,, toute ville a besoin dtre planifiée pour ne pas devenir rapidement un misérable fouillis. Bref, un plan de la ville et une législation urbaine étaient nécessaires et leur application se devait dtre immédiate.

Ainsi, le trop grand nombre d'etablissements de la rue du Quay devenait un danger et le Conseil convenait, en 1721, "d'empêcher dorénavant de se placer dans cet entroit" [1]. De plus, on signale la mauvaise construction des édifices des particuliers et leur disposition insouciante du bien publie [2]. Enfin, depuis 1717, la Cour réclamait que l'ingénieur Verville dressât un plan de la ville pour "déterminer les rues et places de Louisbourg, et les endroits où l'on pourra [it] bâtir" [3]


Dé 1717 [4], Verville dresse un premier plan: il y fîxe la largeur du quai à dix toises, et cette largeur est confirmée par une ordonnance du Roi de la même année [5] et une autre de 1721 [6]. Son plan découpe les premiers îlots et indique leurs dimensions. Il y propose des rues d'une trentaine de pieds de large, perpendiculaires entre elles et corrigeant l'alignement des premiers établissements. Une carte de l'année suivante reproduit très clairement ce premier projet, et indique un début de toponymie [7]: les rues Toulouse [8]: St-Louis, de l'Estang, Dauphine et de Canada coupent à angle droit les rues Royale et d'Orléans, et délimitent les îlots qui porteront plus tard les numéros 1, 2, 3, 4, 5, et 12,13, 14, 15, 16 et 17. De plus l'îlot 3 est divisé par une rue étroite, la rue du Cloistre, parallèle à la rue Royale, et au bout de laquelle est tracée perpendiculairement la rue de l'Eglise, de me largeur que les autres rues tracées sur le plan. Cette dernière rue n'est pas identifïée sur la carte [9].

En 1720, [10] une carte confectionnée par Boucher reproduit ces différents éléments, à l'exception de la toponymie, ajoutant encore à ce premier plan une rue et des îlots à l'ouest de ceux découpée par la rue Toulouse, la rue du Rempart [11]. De plus, une autre parallèle au sud de la rue d'Orléans est tracée, délimitant ainsi de nouveaux îlots dans ce secteur. Le premier projet de Verville y est respecté; il prend seulement un peu plus d'extension, due au développement qu'a pris la ville au cours des deux ou trois années qui se sont écoulées.


Mais ce ne sont là que des projets, et ces alignements de rues ne sont que trés rarement, nous l'avons mentionne" précédemment, confirmés par des constructions qui les respectent. De fait, selon ces projets, la rue Royale, par exemple, est tracée à trente toises de l'alignement du quai, et sa parallèle, la rue d'Orléans, passe a trente toises plus au sud. Or, ces mesures, et quelques autres qui sont indiquées sur la plan de 1717, ne coincideront plus avec le plan définitif, et l'on peut dès lors supposer que ces plans ne constituent en fait que des projets approximatifs.

De fait, en 1721, une ordonnance royale stipule que

"les edifices bâtis Jusqu' à present à Louisbourg n'etant que de pieux avec du bousillage ... et dans ces edifices les habitant, surtout ceux qui ont reçu des concessions près du grand étang, y ont construit sans suivre les alignements projetés de la ville et y etant necessaire d'y pourvoir, le Roi ordonne à Verville de faire un plan de la ville, ainsi que des endroits où l'on pourra bâtir des édifices et clos de muraille" [12].

D'ailleurs, il faut encore souligner que ces embryons de plan ne visent que l'immédiat, et ne sont développée qu'avec l'expansion progressive de la ville. Or, il est nécessaire de prévoir cette expansion de la cité et de la déterminer à l'avance. Le plan exigé par la sus-dite ordonnance doit etre un plan général d'aménagement de tout le territoire urbain. C'est ce à quoi Verville voudra se conformer en confectionnant son plan définitif.


Traçant la ligne des fortifications du té des terres, Verville détermine l'emplacement et l'extension de la future cité. Celle-ci se trouve bloquée du côté du sud et de l'ouest par la fortification projetée, et cernée des autres tés par la mer qui l'environne. Toutefois, elle s'étend sur toute la pointe de Rochefort, ce qui lui conne une étendue approximative de quelque six cent toises d'est en ouest, et d'environ deux cent toises du nord au sud, en sa partie la plus large.

En fait de tracé de ville, ce plan n'a rien de très original ni de tres particulier, par rapport aux villes fortifiées de l'epoque. Verville s'est inspiré du plan dit de l'échiquier et des bastides mediévales, plan que le célèbre Vauban appliqua à bon nombre des forteresses qu'il construisit et dont il fit le trace [14]. Les villes de Brest et de Toulon, par example, lui doivent, outre leurs fortifications, le trace de leurs rues et de leurs îlots rectangulaires. Originaire de Bretagne, Verville a très certainement connu ces villes; aussi appliqua-t-il ce système familier pour lui à la ville qu'il devait aménager.

Les voies sont donc parallèles et perpendiculaires entre elles, et découpent des îlots en forme de rectangles, à l'exception de ceux qui ceinturent la ville et qui suivent alors la ligne de la côte et celle des fortifications. Ces îlots sont d'étendues diverses, car les rues ne sont pas situées à égale distance les unes des autres; nous trouvons donc des îlots de 33 toises de profondeur entre le quai et la rue Royale, de 29 toises entre les rues Royale et d'Orléans, de 28 entre la rue d'Orléans et la rue de France, et de 30 toises entre la rue de France et celle de Scatarie. Leur largeur est encore plus variée: 50 toises pour l'îlot 1, de même que pour l'îlot 17: 34 pour les îlots 2 et 16; 27 et 1/2 pour les l'îots 3, 15, 19 et 34; 35 pour les îlots 4, 14, 20, 33 et 37; 40 pour les îlots 5, 9, 10, 11, 12, 13, 21, 22, 23, 24, 25, 28, 29, 30, 31, 32, 38 et 39; 46 toises pour les îlots 7, 8, de même que 26: 46 toises également pour les îlots découpés entre les rues des Vigneaux et Courte; et enfïn 96 toises pour les deux derniers rejoignent l'extrémité de la pointe Rochefort [15]. L'îlot numéro 6 est en grande partie occupé par l'étang, et les l'îlots 18, 27, 35, 36 et 40 sont de formès diverses et leurs mesures exactes ne sont pas indiquées.


D'apparence facile et ignorant de toute complication, ce plan manifeste malgré tout une certaine recherche. Ce n'est vraisemblablement pas par insouciance que les îlots sont aussi variés dans leur étendue et que les rues ne sont pas situées à égale distance l'une de l'autre. Nous y voyons, personnellement, une détermination préconçue et volontaire d'adapter un système facile et régulier, où la fantaisie ne prend habituellement aucune part, aux besoins spécifiques de Louisbourg.

C'est ainsi que les rues, malgré leur tracé rigoureusement rectiligne, sont situées de façon à joindre les points essentiels de la ville, au encore de façon à apporter le plus de facilités et d'accomodements possible. La rue d'Orléans, la rue de France et la rue Saint-Louis forment les côtes de la Place d'Armes ménagée en face du château Saint-Louis; la rue Toujouze [sic] est tracée un peu, plus large que les autres; sa largeur serait d'environ trente pieds - cette mesure n'est pas indiquée, mais il ressort très nettement qu'elle est proposée plus large que les autres-. Pourquoi? c'est cette rue qui relie le quai, arrivent les marchandises, aux magasins du Roi et au château, où elle aboutit à la pointe du glacis de la Place d'Armes. A cause de l'important trafic qui devait se faire par cette rue, du fait aussi que les troupes devaient être amenées à y circuler plus fréquement qu'ailleurs en formation, il était important que cette rue eut une largeur appropriée, et la largeur de quatre toises [24 ou 25 pieds] indiquée pour la rue Saint-Louis, la rue de l'Eglise, et la rue de l'Hôpital, et qui semble être uniforme pour toutes les autres rues de la ville, pouvait être insuffisante.

D'autres rues sont situées de telle façon qu'elles permettent de relier facilement les divers points de la fortifications la rue de l'Estang aboutit au centre du bastion de la Reine, et la rue de Canada fait de même à 1 'égard du bastion Princesse.

Au plan sont encore marquées les places réservées. Outre la Place d'Armes, qui n'est pas indiquée comme telle sur le plan, il y en a deux de prévues: l'une dans l'îlot 23 et l'autre dans l'îlot 39.

Enfin, on projette de redresser l'alignement de la rue du Quay, et d'en placer les édifices sur la ligne est-ouest qui constitue l'alignement des rues de la ville.


Le plan de la ville de Louisbourg dressé par l'ingénieur Verville manifeste donc à la fois la grande symétrie des villes modernes de l'epoque, par le tracé rectiligne de ses rues et la forme rectangulaire de la plupart de ses îlots, et une certaine fantaisie par la diversité d'etendue des l'îlots et la forme irrégulière de certains d'entre eux. Enfin, il y transpire une certaine préoccupation de faire sinon quelque chose de beau, du moins quelque chose de conçu en fonction de l'utilité. Le système un peu banal de échiquier est adapté aux besoins de la place, et les rues aboutissent aux points stratégiques. Quant aux défauts, celui qui s'impose le plus vivement à nos yeux à ce stade de notre étude, est sans doute d'avoir négligé de donner une certaine composition à ce plan, en omettant de ménager des artères principales, plus larges et plus ouvertes, qui auraient constitué l'axe de la ville et auraient unifié les éléments un peu épars qui se partagent le territoire de la cité.


Le plan de 1722 débordait largement, évidemment, l'expansion réelle de la ville à ce moment précis. En 1721, on l'a vu precédémment, celle-ci se limitait effectivement aux cinq îlots découpés au nord de la rue Royale. L'année suivante, on peut constater la chose sur le plan de Verville, les îlots du côté sud de la rue Royale commencent à être concédés et bâtis. me, on trouve quelques établissements dans l'îlot 19 et quelques autres le long de la rue de l'Estang. Enfin, on trouve encore, indiquées sur cette même carte, quelques concessions sur la pointe à Rochefort.
Mais il reste près d'une trentaine d'îlots qui ne portent encore aucune concession, et sur lesquels aucune construction n'est faite. Le plan de 1722 est donc réellement un plan oui voulait déterminer à l'avance les lignes de l'expansion future de la cite, jusqu'à ce qu'elle ait atteint
son plein développement. C'était un plan pour les années a venir.

Aussi peut-on se demander ce qu'il devait advenir de ce plan, comment il serait exécuté effectivement.

Le années 1723 à 1730 ne nous apportent gre de lumière là-dessus, et il est impossible de voir de près le développement que connait la ville au cours de cette période. En 1730 [16] cependant, on peut constater que l'on s'est décidé à occuper les îlots intérieurs. Certes, les marchands et les pêcheurs continuent de se tenir le plus près possible du port: les îlots de cette section sont manifestement totalement occupés. Mais les ouvriers, les gens de métier, de même que les officiers de la garnison n'ont pas les mêmes attaches et s'établissent le long des rues d'orléans et de France, jusqu'à la rue d'Estrées. Tous les îots de cette partie de la ville sont entièrement concédées derrière les maisons qui bordent les rues, des jardins sont tracés qui occupent complètement le territoire des îlots. Au delà de cette limite, quelques îlots sont partiellement occupés, mais cette dernière partie de la ville reste tout entière à aménager, en pratique.


De cette mise en valeur en somme assez rapide, si on la compare à ce que la ville était en 1722, il surgit évidemment des conflits de propriétés. Malgré de beaux tracée rectilignes qui apparaissent sur la carte de 1730, l'on peut être certain que la ville se trouve dans le désordre le plus complet. Les contestations de bornages de terrains sont très fréquentes, semble-t-il, et la Cour est plus ou moins au courant de l'état de la ville. En 1725, Maurepas demande à Saint-Ovide et de Mésy de vérifier avec Verrier si aucun des terrains réservés pour les bâtiments du Roi ou pour les fortifications n'a été pris pour autre chose, et de voir à ce que chaque habitant sache exactement ce qu'il possède. De plus, il les met en garde de ne pas concéder des terrains déjà alloués à d'autres habitants. Des gens se plaignent de ce que des parties de leurs terrains sont accordées à d'autres [17].

En 1727, le ministre écrit encore: "Je compte que vous ne différez pas davantage à m'envoyer l'estat des concessions que vous avez accordé, et que je vous demande depuis longtemps [18]. En même temps, il nous apprend que des rectifications de terrains ont eu lieu: "J'ai approuve que vous ayés concedé au nommé Paris le terrain qui est entre sa maison et le jardin de la De. de Villejouin pour le dedommager de celuy qu'on luy a pris d'un autre sté pour les fortÎfÎcations et l'alignement des rues" (19). Ces allusions manifestent très nettement l'urgence de fixer définitivement le plan de la ville, de même que de regler les concessions accordées.

Vallée est donc chargé de lever les toisés de tous les terrains de la ville. Il y passe les années 1733 et 1734. L'état de la ville était alors si défectueux que "toutes les isles na s'etant point trouvées conformes au plan qui avoit eté dressé, Jusqu'à present il a fallu retoizer chaque isle en particulier pour redresser ceux qui s'etoient mal placée. Cette ouvrage a eté trés longue" [20]. L'arpenteur rédige donc un "état" et dresse un plan de la ville sur lequel "les deffectuosités qui se sont trouvée dans les allignements desd. terrains ont eté corrigés pour faciliter l'Expedition des brevets et prévenir Toutes les difficultes qui mourront se mouvoir Entre les Concessionnaires dans la [110v] suite" [21].

Par le plan [22] ainsi corrigé, on peut voir aue la ville a continué de se développer depuis 1730. Il ne reste plus qu'une dizaine d'îlots à ne point être encore concédés, mais il s'en trouve maintenant 45 au lieu de 40 [23]. Le reste de la ville est totalement concedé. Bien sûr, la partie la plus densément occupée et peuplée est celle de la presqule du grand étang et des îlots de la rue Royale (îlots qui portent les numéros 2, 4, 5, 14e 15, 16). Mais les îlots délimités par la rue d'Orléans, la rue de France et la rue de Scatary [sic] sont partagée eux aussi entre plusieurs propriétaires: de six à huit. Seul l'îlot 44, très petit, n'est partagé qu'entre trois propriétaires. Au delà dé la rue d'Estrées, les concessions sont plus vastes et le nombre de propriétaires à se partager un même îlot est moins grand: de deux à six. Enfin, seuls les îlots portant les numéros 7, 26, 27, 28, 39, 41, 42 et 43 ne portent aucun signe d'établissements. D'ailleurs, "l'estat des terrains concédés" de Vallée [24], à partir duquel l'arpenteur a dressé sa carte de la ville, mentionne justement qu'ils n'ont pas été concédés encore.

Comme disposition, le plan est resté identique a celui de 1722, du moins dans ses grandes lignes. Bien sûr, nous le verrons plus loin, des modifications sont survenues. Mais le plan est le même. On peut donc dire que, de projet, le plan de Verville de 1722 est devenu, en 1734, après les nombreuses corrections aue laissent supposer les textes, une réalité.

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